Point de repères & Histoire de France

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Un peu de culture...

La Renaissance constitue une époque transitoire dans l’histoire du parfum.

Catherine de Médicis lance vraiment la mode du parfum à Paris. Des progrès techniques importants sont faits dans le domaine de la chimie permettant d’améliorer la distillation et la qualité des essences. La ville de Grasse assoit sa renommée sur les gants de cuir parfumés, alors très en vogue, et développe une industrie qui lui offre le titre de " Capitale mondiale du parfum ", quelle conserve encore de nos jours.

Dès le XIIe siècle, Grasse noue des liens commerciaux avec Gênes et l’Espagne. Avec l’invention de l’imprimerie de nombreux ouvrages techniques livrent des recettes d’eaux odoriférantes, à base florales ou animales, pour le corps, la maison mais aussi des parfums secs destinés aux pommes de senteurs, aux gants et aux ceintures.

A la fin du XVIIe siècle, la tendance est aux senteurs naturelles et champêtres : eau de mille fleurs, Eau divine… mais surtout eau de Cologne très réputée pour ses vertus thérapeutiques. Un siècle plus tard Napoléon Bonaparte utilise chaque jour une bouteille en frictions.

Parallèlement la mise au point du cristal de plomb permet la création de flacons en cristal enserrés dans des montures en or, en bois ou en cuir.

 

Au XVIIIe siècle, la France domine le monde du parfum avec Grasse et Paris où les plus grands parfumeurs des cours d’Europe, tel Jean-François Houbigant, se sont installés. La distillation et l’enfleurage à froid sont inventés. La cour de Louis XV est qualifiée de " cour parfumée ". Il est de bon ton de changer de parfum tous les jours et d’avoir gants et vêtements parfumés. Les femmes raffolent des poudres, pendentifs, boîtes bergamotes " orangettes " obtenues à Grasse avec l’écorce de bergamote. Vers la fin du siècle, Marie-Antoinette relance la mode des senteurs champêtres, fraîches et naturelles.

Les contenants précieux envahissent les boudoirs et les tables de toilette. Les nécessaires de beauté, boîtes à mouches, pommanders deviennent de véritables œuvres d’art. Le flacon émaillé est peint ou en porcelaine de Sèvres, de Chelsea et de Meissen à partir de 1720. Cette manufacture propose aux dames des flacons en forme de gourde ou de balustre, illustrés de scènes de genre ou de chinoiseries. Sous l’influence du sculpteur Joachim Kaendler des flacons anthropomorphes sont créés. Le verre reste cependant privilégié. A l’époque, contenu et contenant sont encore vendus séparément. Le parfumeur fournit ses créations dans des fioles toutes simples. Les clientes transvasent les jus dans des flacons ouvragés.

La Révolution Française porte un coup funeste à la parfumerie. Balayant tout ce qui peut rappeler le faste de la cour de Louis XVI… et ceci malgré la création de parfums aux noms évocateurs : « Parfum de guillotine », « A la Nation ». Il faut attendre le Directoire pour voir le retour à une frénésie de luxe et de parfum.

 

Au XIXe siècle, le parfum redevient le centre des préoccupations des dames. L’impératrice Joséphine lance la mode des senteurs exotiques comme la vanille ou la cannelle, qui lui rappellent son enfance créole. Sous la Restauration les senteurs légères et douces sont plébiscitées. Durant ce siècle des maisons de parfum, encore en activité aujourd’hui, sont créées : L.T Piver en 1813, Guerlain en 1828, Molinard en 1849, Roger et Gallet en 1862, Bourjois en 1868 et Coty en 1898.

Le XIXe est le siècle où l’activité de la parfumerie prend vraiment son essor et entre dans l’ère de la modernité. Les " jus " sont désormais moins éphémères et de meilleure qualité. Mais le parfum reste un luxe (plus coûteux qu’un bijou).

La Révolution Industrielle, vers 1850, provoque une mutation profonde dans le mode du parfum avec l’invention de la méthode d’extraction par solvants volatils (dont le brevet est détenu par le grassois Léon Chiris), et celles des composants synthétiques pour reproduire des substances naturelles, comme la vanilline (vanille), la coumarine (fève tonka) ou la ionone (violette) et de créer de nouvelles odeurs. La fabrication devient industrielle permettant enfin, aux classes moyennes d’accéder au parfum. De grandes maisons se développent, comme Guerlain, qui fonde sa notoriété sur " L’eau de Cologne impériale ", qui a conquis l’impératrice Eugénie en calmant ses migraines. La prestigieuse maison est également à l’origine du premier parfum moderne. En effet, les parfumeurs ne créent que des parfums soliflores ou à note unique. En 1889, Aimé Guerlain révolutionne la parfumerie avec " Jicky ", premier parfum alliant avec subtilité essences naturelles et produits de synthèse où est pris en compte le fait que les odeurs s’évaporent à différentes vitesses : la note de tête (composée des essences qui ne durent que quelques minutes), la note de cœur (les éléments essentiels), et la note de fond (senteurs persistantes et fixateurs). Cette architecture pyramidale va rapidement devenir le modèle dominant. Il impose néanmoins la mise en bouteille à l’usine.

Le flacon se doit désormais d’être beau et séduire l’acheteur. Le parfum ne peut plus être transvasé. Les parfumeurs font appel à de véritables artistes pour créer leurs flacons. Ils deviennent des écrins emblématiques de fragrances. Baccarat est la première cristallerie à répondre à ces nouveaux besoins. De cristal clair ou émaillé, chacun de ces flacons révèle la sophistication extrême des techniques de décor.

 

Avec le XXe et l’Art Nouveau, la parfumerie a le souci exacerbé de la beauté du flacon. En 1907, François Coty, pour qui le flacon doit être une véritable œuvre d’art et refléter la qualité de son contenu, s’associe au verrier René Lalique pour la commercialisation du parfum " Ambre Antique ". Après la première guerre mondiale vient la période des années folles, marquées par la course à la modernité, la recherche de la nouveauté et de l’exotisme. L’Art Déco succède à l’Art Nouveau. Paul Poiret, qui a déjà libéré la femme du corset et impose le parfum comme partie intégrante de la parure féminine, crée " Rosine " (du nom de sa fille aînée), dont il dessine lui-même les flacons. Il est bientôt imité par un grand nombre de couturiers, qui offrent de petits flacons en cadeau à leur clientèle, puis à vendre des parfums portant leur griffe : " Arpège " de Lanvin, créé en 1927 par André Fraysse, au fameux flacon boule noire ; le mythique " N°5 " de Chanel, créé en 1921 par Ernest Beaux, et qui reste aujourd’hui le prototype des parfums aldéhydés ; " Shocking " de Shiaparelli en 1930, en forme de buste de femme. Les flacons sont de plus en plus ouvragés et originaux. En 1925, à l’Exposition Internationale des Arts Décoratifs sont représentés les plus grands parfumeurs français : Coty et ses superbes flacons Lalique, les parfums de Rosine, L.T Piver, et surtout Guerlain, qui présente à l’occasion son légendaire " Shalimar " dans un flacon signé Baccarat. Le parfum XXIII de Delettrez est présenté dans un faux collier de 13 perles de taille décroissante, dont 11 sont de petits flacons placés à l’envers dans l’écrin, les deux perles extrêmes étant factices; en 1938 la maison Varva (New-York) sort " suivez-moi ", dont le flacon est une bague portant une grosse perle. Tout récemment, le parfumeur-joaillier Boucheron a repris l’idée du flacon-bijou avec " Jaïpur ", au flacon en forme de bracelet, et tout récemment avec " Initial ", " le parfum-perle ".

 

La Libération marque le début d’une nouvelle ère pour la parfumerie. Celle de l’abondance et de la variété de création.1945 est marquée par la sortie de nombreux parfums célébrant la victoire :

"L’Heure attendue" de Patou, "Cœur joie" de Nina Ricci, "Le Roy soleil" de Schiaparelli, au flacon dessiné par Salvador Dali. Une nouvelle vague de couturiers-parfumeurs déferle sur la France : "Vent Vert" de Balmain, "Ma griffe" de Carven, "Bandit" de Piguet, l’intemporel "Air du Temps" de Nina Ricci et "Miss Dior" de Christian Dior.